Suharto est mourant !

Toriâble ! Et je l'ai retiré de mon pool


LE MONDE | 09.01.08 | 15h00 • Mis à jour le 09.01.08 | 15h00
BANGKOK CORRESPONDANT

Les autorités se préparent au décès de l'ex-dictateur indonésien Suharto

L'ancien dictateur indonésien Suharto, au pouvoir entre 1965 et 1998, risque de mourir sans avoir répondu des faits de corruption et de détournement de fonds qui lui sont reprochés. Dix ans après avoir été chassé du pouvoir, Suharto, âgé de 86 ans, se trouve, depuis le 4 janvier, dans un état qualifié de "critique" à l'hôpital Pertamina, à Djakarta. Après avoir connu un léger mieux, sa santé s'est à nouveau détériorée mardi 8 janvier. Il souffre de troubles du coeur, des reins et des poumons. M. Suharto reste en mesure de s'exprimer, mais les visites d'officiels à son chevet ont été suspendues.

Depuis son hospitalisation, l'actuel chef de l'Etat, Susilo Bambang Yudhoyono, et plusieurs dignitaires du régime, ainsi que des figures en vue du clergé musulman se sont rendus auprès de celui qui a dirigé le pays pendant près de trente-deux ans après avoir pris le pouvoir lors d'un coup d'Etat en 1965. Les autorités préparent son éventuel décès : cinq avions militaires sont prêts à décoller de Djakarta pour le ramener dans la province de Java, dont il est originaire. La solennité entourant la fin de sa vie contraste avec les manifestations populaires d'hostilité qui ont provoqué sa chute en 1998.

Son retrait du pouvoir lui a garanti, de facto, une immunité inavouée qui n'a donné lieu qu'à des protestations limitées d'une petite partie du spectre politique. Toutes les poursuites en justice pénale pour complicité dans des cas de violation des droits de l'homme pratiquée à grande échelle ont été abandonnées en 2007 en raison de son état de santé. Sous son régime, des centaines de milliers de personnes ont été tuées, blessées ou emprisonnées dans des opérations militaires et de police menées contre toute forme d'opposition.

Suharto reste sous le coup d'accusations de la justice civile pour des appropriations de fonds publics et privés atteignant des sommes inégalées. L'organisation non gouvernementale (ONG) Transparency International a avancé le chiffre de 40 milliards de dollars (27 milliards d'euros) ponctionnés sur la richesse nationale au fil des ans par le dictateur et son clan.

ABUS DE BIENS SOCIAUX

Après son hospitalisation, le premier parti politique indonésien, le Golkar, dont il est le fondateur, a demandé "l'abandon de toute procédure judiciaire" à son encontre. L'Etat réclame 1,4 milliard de dollars de dommages et intérêts pour abus de biens sociaux par le biais d'une fondation "caritative" contrôlée par la famille de Suharto.

La chambre intermédiaire de justice de Djakarta saisie du cas a rejeté, mardi, toute suspension de la procédure, qui doit, selon le gouvernement, se poursuivre à l'encontre de sa famille après le décès du dictateur "dans l'intérêt du public". De nombreux opposants et observateurs politiques doutent de la volonté de l'administration du président Susilo, et de celle du chef de l'Etat, de mener à bien ce grand nettoyage politico-financier qui risquerait d'avoir des retombées plus étendues que celles pesant sur le seul clan familial de Suharto.
Francis Deron